Les cabinets de conseil vont-ils s’accaparer le marché de la publicité?

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Depuis quelques années, les cabinets de conseil occupent de plus en plus de place dans le marché de la publicité et de la communication. De leur côté, les grandes agences s’adaptent et s’organisent. Décryptage sur cette concurrence croissante.

L’avènement du taylorisme a entraîné aux États-Unis, au début du XXe siècle, l’émergence de cabinets de conseil en stratégie, mandatés pour accroître la compétitivité des entreprises. Avec le temps, le pouvoir de ces cabinets a grandi, au point que les consultants s’imposent aujourd’hui dans le monde politique mais également dans celui de la publicité. « La concurrence croissante entre les cabinets de conseil et les acteurs traditionnels de la publicité est une réalité tangible », explique David Naim, associé chez EY Advisory, dans le journal Stratégies.

Des acquisitions symboliques : Sapient

Le « conseil stratégique » a en effet envahi progressivement l’univers feutré de la publicité. L’activité des Big Four du conseil (PwC, Deloitte, EY, KPMG) a crû, au rythme de la digitalisation d’une grande partie de l’économie, notamment dans le marketing digital. A titre d’exemple, en France en 2020, la publicité numérique a conquis plus de 50% du marché publicitaire. Une transversalité des services est à l’œuvre, liée notamment à la convergence entre l’activité industrielle – qui fabrique – et l’activité marketing – qui vend. Les services s’emboitent de plus en plus afin de mettre en avant la nouvelle valeur centrale : l’expérience client.

En réaction, les agences de publicité n’ont pas manqué de riposter en diversifiant leur offre et en investissant le monde du conseil. A l’image de Publicis, groupe de communication français fondé en 1926 par Marcel Bleustein-Blanchet, qui a racheté à grands frais – trois milliards d’euros – l’agence américaine de transformation numérique Sapient en 2014 et qui se positionne de plus en plus sur le marché du conseil en stratégie. « La business unit conseil en stratégie de Publicis Sapient est passée de 0 à 200 dans le monde en deux ans », explique Olivier Abtan, directeur général de Publicis Sapient.

Les agences historiques tiennent le cap : Dentsu

De son côté, le géant japonais de la publicité Dentsu a décidé de faire face à cette concurrence en lançant il y a quelques années la création de cabinets sur mesure. Une capacité d’adaptation payante puisque Dentsu est aujourd’hui l’agence marketing exclusive des Jeux olympiques 2020 – qui auront finalement lieu cet été. Habituée à rationaliser son activité, l’agence Dentsu avait inventé, dès 1964, un modèle économique inédit, fondé sur un investissement mi-public mi-privé,  pour les Jeux olympiques. Modèle aujourd’hui de référence puisqu’il a permis, dès 1984, aux JO d’être rentables.

Rentabilité, efficacité, expérience client… Sous la pression des cabinets, les agences se perfectionnent. Car elles ne souhaitent pas laisser le pouvoir aux consultants, qui risquent d’appauvrir les propositions créatives. « Les agences ont une compréhension plus fine des enjeux des marques et des problématiques des dirigeants marketing. Elles maîtrisent le pouvoir créatif et certaines ont un vrai ADN digital » résume Thomas Husson, VP et Principal Analyst chez Forrester.

Créativité versus efficacité ?

En bref, les consultants se distinguent par leur capacité à apporter une plus grande discipline notamment au niveau des process et des outils numériques. Surtout, ils vont « forcer les dirigeants marketing à réellement porter la voix du client final dans les comités de direction » précise encore Thomas Husson. « Les cabinets sont très bons pour vendre des solutions bien packagées et adaptables dans le temps, comme de lourds projets de transformation IT, note Vincent Luciani, ex McKinsey et aujourd’hui directeur général d’Artefact. Les agences sont beaucoup plus réactives et autonomes ».

Pour s’adapter, ces dernières doivent donc apprendre à optimiser leurs process et leur technologie, en favorisant le travail collaboratif et les équipes pluri-disciplinaires, ce que font déjà aujourd’hui les grandes agences comme Dentsu, Havas ou Publicis.

 

 

 

 

 

 

 

 

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