La BCE veut évaluer la résistance des banques aux changements climatiques

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La Banque centrale européenne (BCE) a lancé le premier test de résistance des grandes banques de la zone euro aux changements climatiques. Contrairement aux tests « classiques », il sera sans conséquence sur le niveau de fonds propres exigés. Le but : provoquer une prise de conscience.

Un test inédit lancé par la BCE

Le test débuté le 27 janvier 2022 porte sur des « classes d’actifs spécifiques » identifiés comme présentant potentiellement un risque en cas de crise climatique, plutôt que sur les « bilans globaux des banques ». Selon Luis de Guindos, vice-président de la BCE, le but est « d’aider les autorités publiques et les institutions financières à évaluer les effets des risques climatiques sur les entreprises et les banques au cours des trente prochaines années ». Si ce test de résistance inédit sera sans conséquence sur le niveau de capitalisation demandé, il pourrait néanmoins avoir un impact indirect sur les règles de gouvernance et de gestion des risques ainsi que l’évaluation propre des risques de solvabilité.

La BCE a créé deux catégories de risques liés au changement climatique. Le premier est « le risque physique, qui tient à l’augmentation attendue de la fréquence des catastrophes causées par les aléas de la nature et à leur aggravation ». Le second est « le risque de transition, dans lequel l’introduction tardive ou soudaine de politiques climatiques visant à réduire les émissions de CO2 pourrait avoir une incidence négative ». Les banques fourniront leurs réponses à un questionnaire fouillé à partir de mars, avant que la BCE ne publie les résultats globaux en juillet. 

Les banques françaises conscientes des risques liés aux changements climatiques

En France, les six plus grandes banques (Société Générale, Crédit Agricole, La Banque Postale, Crédit Mutuel Alliance Fédérale, le groupe Banque Populaire Caisse d’Épargne et BNP Paribas) ont été les premières au monde à s’engager collectivement pour le climat : « Dès janvier 2022, elles ne financeront plus les projets dédiés et les entreprises, dont la part d’hydrocarbures non conventionnels dans l’exploration, et la production (pétrole de schiste, gaz de schiste et sables bitumineux) serait supérieure à 30 % de leur activité », indiquait la Fédération Française Bancaire, le 18 octobre 2021. 

« Le risque climatique est aussi financier : il faut arrêter de donner le sentiment que le risque financier est l’affaire des gens sérieux et le risque climatique l’affaire des écologistes. Ce sont les mêmes », expliquait, le 18 janvier 2022, Nicolas Théry, le président de la Confédération nationale du Crédit Mutuel. Qui peut d’ailleurs se réjouir de voir la fédération bretonne du Crédit Mutuel, Arkéa, renouer avec ses valeurs mutualistes sous la direction de son nouveau président, Julien Carmona. La banque s’est en effet illustrée en dévoilant, en octobre 2021, “ une méthodologie permettant d’évaluer en euros ses performances extra-financières ”, dont l’un des objectifs est notamment de diminuer l’impact négatif des investissements de la banque dans le domaine environnemental.

Des pertes liés aux changements climatiques potentiellement colossales

Selon une étude parue le 1er juillet 2021 dans la revue scientifique The Lancet, « les conditions météorologiques extrêmes (provoquées par le changement climatique, NDLR) ont été à l’origine de 9,4 % des décès survenus dans le monde entre 2000 et 2019 ». Le risque n’est donc plus lointain, mais bel et bien un paramètre à prendre en compte dans la vie de tous les jours. « À long terme, le changement climatique devrait accroître la charge de mortalité » a ainsi déclaré Yuming Guo, co-auteur du rapport et professeur à l’université de Monash en Australie.

Une étude américaine de juillet 2020 du National Bureau of Economic Research (NBER) avait quant à elle évalué les pertes économiques à environ 3,2 % du PIB mondial en 2100 dans un scénario de fortes émissions. Les régions pauvres et chaudes d’aujourd’hui devraient ainsi subir les dommages les plus importants. Leurs estimations indiquent même que « le rejet d’une tonne supplémentaire de CO2 aujourd’hui causera des dommages liés à la mortalité de 36,6 $ dans un scénario d’émissions élevées ». Dans un scénario d’émissions modérées, ces dommages sont quantifiés à « seulement » 17,1 $. Des chiffres dont le NBER rappelle qu’ils « dépassent d’un ordre de grandeur les estimations de la littérature précédente ».

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