Si l’hydrogène n’intéressait pratiquement personne au début des années 2000, il fait aujourd’hui l’objet d’une attention particulière. En témoigne les plans hydrogène en Europe et l’organisation au Maroc du premier World Ptx Summit centré sur la recherche et les investissements dans cette filière.
L’hydrogène commence à faire consensus et surtout à mobiliser. Cette semaine, a eu lieu à Rabat (Maroc), la première édition du World Ptx Summit, qui vise à favoriser la création d’une plateforme régionale dédiée à l’hydrogène vert et à ses applications dans l’ensemble de l’économie « Power-To-X » (PtX). Cette plateforme a rassemblé les principaux investisseurs, les décideurs politiques, les innovateurs, les industriels et les experts de la recherche. Au total, elle a réuni plus de 200 personnes issues d’une soixantaine de pays, dont ceux d’Europe. Ces Etats européens ont récemment dévoilé des plans hydrogène pour accélérer leur transition énergétique. La France a annoncé un budget de 7 milliards d’euros et l’Allemagne a débloqué pas moins de 9 milliards d’euros.
Bourakébougou en exemple
Ces investissements colossaux serviront principalement à décarbonner l’industrie et permettre le déploiement d’une mobilité propre. A côté de ces engagements publics, on enregistre de plus en plus d’efforts venus du privé. Par exemple de l’entrepreneur malien Aliou Diallo, fondateur de Hydroma. Cette société transforme depuis 2012 l’hydrogène naturel en électricité verte pour les habitants de Bourakébougou, au Mali. Face au succès de ce test, l’homme d’affaires a récemment lancé une exploitation à grande échelle et parallèlement débuté la production d’hydrogène vert dans le Sahel. Il souhaite à terme exporter cette production en Europe via un futur pipeline de près de 5000 kilomètres.
« Nous avons compris ce que personne ne sait aujourd’hui sur l’hydrogène naturel »
L’entrepreneur malien mène sa révolution énergétique depuis 2010, avec ses propres moyens. Pour lancer sa deuxième phase, en juin 2019, il a par exemple cédé ses parts (55%) dans la mine malienne Wassoul’Or. Ces investissements servent non seulement à la production d’énergie propre à partir de l’hydrogène naturel, mais aussi aux forages et aux recherches. « Nous sommes les seuls au monde à investir depuis une dizaine d’années dans la géophysique, la sismique, dans les forages. Nous sommes en train de financer une thèse en partenariat avec l’IFPN. Nous avons pris un étudiant malien pour faire des thèses sur les forages que nous avons réalisés pour expliquer au monde entier ce que nous avons découvert : comment l’hydrogène se forme sous terre, comment il fait sa migration et se stocke dans des réservoirs sous terre, et qu’est ce qui empêche in fine la migration de l’hydrogène en surface. Nous avons compris ce que personne ne sait aujourd’hui sur l’hydrogène naturel », a indiqué Aliou Diallo au cours d’une interview sur la chaîne Africable Télévision, en octobre dernier.
Hydroma a fait en huit ans plus de 6000 mètres de forage en partenariat avec des sociétés canadienne, australienne et européenne. « Nous avons fait des forages shallows, des forages deep, des forages ultra deep dans le cadre de l’hydrogène. Nous sommes allés jusqu’à plus de 2000 mètres. Nous avons pu comprendre qu’avant d’arriver au socle, il y a cinq réservoirs juxtaposés qui contiennent d’hydrogène », précise Aliou Diallo.
L’Allemagne salue les efforts d’Aliou Diallo
Grâce aux travaux d’Hydroma, Aliou Diallo s’est fait connaître dans le milieu scientifique en Allemagne, pays qui ambitionne de devenir numéro Un de l’hydrogène. Dans le programme national de l’hydrogène dans ce pays, les autorités ont parlé de l’hydrogène blanc, ce qui renvoie à l’hydrogène naturel. « J’étais en Allemagne et on a eu des réunions avec de hauts responsables des ministères. Celui qui chapeaute même le programme de l’hydrogène naturel en Allemagne a dit : « Bravo Mr Aliou Diallo parce que grâce à vos travaux nous avons pu inscrire l’hydrogène blanc dans notre programme national de l’hydrogène », a confié Aliou Diallo, qui est régulièrement invité dans des conférences de l’énergie.