Kits génétiques : un engouement qui pose question

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D’après une étude publiée par la MIT Technology Review le 7 février dernier, plus de 26 millions de personnes aux Etats-Unis auraient déjà effectué un test génétique en kit. Bien qu’interdit en France, la pratique est aujourd’hui facilement accessible en ligne et pose des questions aussi bien juridiques, éthiques que psychologiques.

Des kits génétiques en vente libre aux Etats-Unis

Connaître son profil ADN par simple envoi de prélèvement de salive est devenu en 5 ans un véritable phénomène de mode aux Etats-Unis. En 2017, le leader du secteur AncestryDNA en a écoulé 1,5 million sur le seul week-end du Black Friday et le numéro deux du marché, produit par 23andMe arrivait dans le top 5 des meilleures ventes d’Amazon.

La raison de l’engouement croissant depuis 2013 tient notamment au coût, entre 60 et 200 dollars le test. Les résultats de l’analyse portent sur trois aspects : le risque de développer certaines maladies, la communication des origines ethniques et à la mise en relation avec des personnes à l’ADN proche.

Le marché très lucratif aux Etats-Unis est tel qu’il est en passe de s’ouvrir au tourisme. L’entreprise Ancestry a ainsi passé un partenariat avec une société de voyages organisés pour créer des séjours en fonction des résultats de tests ADN.

Des tests fiables ?

La question de la fiabilité est particulièrement soulevée concernant l’analyse des risques de développer certaines maladies communiqués par certaines sociétés qui commercialisent ces kits. Une récente étude réalisée par des salariés du laboratoire Ambry Genetics a ainsi conclu à un taux de faux positifs important : dans 40 % des 49 échantillons analysés,  les résultats indiquant un risque de développer une maladie n’étaient pas corroborés par les tests plus approfondis.

Face à ce taux de fiabilité peu probant, de nombreux fabricants se contentent de communiquer les résultats portant sur les origines ethniques et la mise en relation avec des personnes dont l’ADN est proche. Là encore, il ne s’agit que d’estimations, puisque le listing est établi en comparaison avec les autres personnes ayant déjà effectué le test. Autrement dit, les résultats peuvent varier d’une entreprise à l’autre en fonction de la composition de la base de données.

Questions éthiques et juridiques

En France, malgré les campagnes de publicité diffusées sur internet, avoir recours à un test génétique sans prescription médicale reste interdit. Le développement de la pratique pose de nombreux problèmes à notre législation actuelle dont l’article L1133-4-1 du Code de la santé publique dispose que « le fait, pour une personne, de solliciter l’examen de ses caractéristiques génétiques ou de celles d’un tiers ou l’identification d’une personne par ses empreintes génétiques en dehors des conditions prévues par la loi est puni de la peine prévue à l’article 226-28-1 du Code pénal. »

L’engouement pose également de nouvelles questions éthiques. Car le recoupement avec des cousins éloignés permet désormais d’identifier des personnes n’ayant pas effectué de test. D’après une étude récente d’un chercheur américain publié dans la revue Science, « il suffit que 2 % de la population fasse un test pour qu’on arrive à 100 % d’identification ». La base de données actuelle est telle qu’elle permettrait d’identifier aux Etats-Unis 6 personnes sur 10 d’origine caucasienne, même si elles n’ont pas effectué personnellement le test. Si la police scientifique américaine peut se féliciter d’avoir déjà résolu certaines affaires criminelles qui étaient restées non élucidées, le sujet ouvre la large question de la responsabilité des personnes qui ont recours à ces kits et disséminent leurs données.

L’impact psychologique

Dernier point non négligeable, l’impact psychologique des tests sur certains utilisateurs. La révélation de risques médicaux pourrait entraîner un effet « nocebo » (développement de symptômes à la seule lecture d’un risque encouru) alors même qu’il ne s’agit que d’estimations dont la fiabilité s’avère moyenne.

La découverte, parfois inattendue, de ses origines peut entraîner également de lourdes conséquences. Aux Etats-Unis un groupe Facebook intitulé « DNA NPE » (« not parents expected ») réunit déjà plusieurs milliers d’utilisateurs ayant découvert, à l’occasion du test, que leur père ou leur mère n’était pas leur parent biologique.

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