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Réduction des émissions de CO2 : les promesses du captage carbone

Energie Une

Les techniques de captage et de stockage du dioxyde de carbone (CO2) intéressent de plus en plus les industriels et les institutionnels. Notamment pour atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050, mais pas uniquement. Focus.

A l’heure de l’urgence climatique, l’innovation est mise au service de la transition énergétique. Et toute la matière grise d’être mobilisée pour élaborer des solutions techniques les plus complexes, comme le captage-stockage géologique de CO2 (CSC).

Dans son document intitulé « Les Avis de l’Ademe, le captage et stockage géologique de CO2 (CSC) en France : un potentiel limité pour réduire les émissions industrielles », l’Agence de la transition écologique (Ademe) avance que cette solution « semble incontournable pour certains secteurs industriels fortement émetteurs et n’ayant pas d’autres solutions de décarbonation ». Et le temps presse car, à eux-seuls, les industriels tricolores émettent, chaque année, 80 millions de tonnes d’équivalent CO2.

Trois grandes approches

De fait, certaines de leurs activités – par exemple celles liées à la chimie – produiront toujours des émissions carbonées. D’où l’intérêt de développer des solutions de stockage carbone.

Dans le principe, le stockage carbone consiste à piéger le fameux gaz. Le processus suit trois grandes étapes : la capture avant son évacuation dans l’atmosphère ; sa compression et son transport via des gazoducs ou par bateau ; l’injection dans d’anciens gisements pétroliers, gaziers, ou de charbon.

De l’avis de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et de la Commission européenne, ces techniques sont indispensables pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Un scénario de l’agence table sur la captation de 1,6 milliard de tonnes (Gt) de CO2 chaque année d’ici à 2030, pour atteindre 7,6 Gt en 2050.

Revaloriser le CO2…

D’aucuns s’intéressent fortement à ces procédés et investissent, comme les milliardaires Bill Gates ou encore Elon Musk. Un élan tiré par les progrès technologiques et les perspectives du marché futur. D’ailleurs, 2021 a été une année record pour la captation carbone : pas moins de 71 nouveaux projets ont été enregistrés de janvier à septembre 2021, d’après le Global CCS Institute, un centre de réflexion qui promeut ces technologies. Une bonne nouvelle, si l’on considère que tout ce CO2 capté peut avoir des applications pour le moins inattendues et qu’il répond à un enjeu d’indépendance énergétique en plus d’une problématique environnementale.

Le gaz à effet de serre peut, en effet, être valorisé pour produire des carburants dits E-carburants, E-fuel, etc. « Dans ce cas, ce sont des stratégies de captage et d’utilisation du CO2 émis que nous déployons. Ce sont encore des techniques nouvelles que nous devons explorer avec nos clients », explique Nelly Recrosio, directrice Grands Comptes chez EDF.

Cette technique consiste à convertir, avec du H2O, le CO2 capté dans l’atmosphère ou dans des industries non électrifiables. Aujourd’hui, il est ainsi possible d’obtenir de nombreux produits de synthèse issus du fossile. Et s’ils rejettent eux-mêmes du CO2, celui-ci aura été capté dans l’atmosphère ou dans des industries, et non dans des produits pétroliers. Ce qui permettrait du même coup de réduire la dépendance de la France aux produits pétroliers.

Une filière sur laquelle EDF compte bien se positionner. L’énergéticien, par le biais de sa filiale Hynamics, et le cimentier Vicat ont signé un partenariat afin de capter 40 % du CO2 émis par la cimenterie. Le gaz issu des activités de Vicat sera récupéré et combiné à de l’hydrogène bas carbone pour fabriquer du méthanol décarboné. « Un enjeu de taille car en dix ans, la consommation mondiale de méthanol a doublé et connaîtra une croissance soutenue d’ici à 2050, pour répondre aux nouveaux besoins liés à la mobilité et à la chimie décarbonée », a justifié Vicat au média Lyon Entreprises.

Le méthanol est importé et produit à partir d’énergies fossiles. L’idée ici consiste à développer ces modes de production, afin de réduire la dépendance de la France en produits pétroliers et de répondre ainsi à une demande importante en méthanol dans les domaines des transports, de la chimie, ou encore de la construction. A terme, le projet d’EDF et Vicat, baptisé Hynovi, doit éviter, chaque année, l’émission d’un demi-million de tonnes de CO2.

…Où le stocker de manière pérenne

Prometteur, le captage-stockage de carbone joue la carte de l’évolution pour plus d’efficience. Une technologie, déjà testée sur le site d’ArcelorMittal à Dunkerque (Nord), utilise un « solvant démixant » produit par l’IFP énergies nouvelles. Il permet de réduire la consommation d’énergie de 35 % par rapport à une technologie CCS classique. Des tests ont débuté en mars 2022 et devraient prendre fin en mai de la même année. Ce démonstrateur doit, à terme, capter 4 400 tonnes de CO2 par an. L’industriel ambitionne de réduire de 8% les émissions de son site d’ici à 2030.

Plus au nord, en Islande, la plus grande usine de captage et de stockage de CO2, baptisée « Orca », va capturer le carbone dans l’air et le stocker, plutôt que de le piéger à la sortie des cheminées et le recycler. Née de l’association entre l’entreprise suisse Climeworks et le projet islandais Carbfix, l’infrastructure recourt à la technologie « Direct Air Capture ». Plus concrètement, douze ventilateurs capturent l’air ; le CO2 est ensuite filtré et chauffé pour le séparer de l’air pur, ce dernier étant ensuite relâché dans l’atmosphère. Le gaz est, quant à lui, mélangé à de l’eau et réinjecté à 1000 m de profondeur dans le basalte, où il va se dissoudre et se minéraliser.

Le CO2 est extrait de l’atmosphère de façon permanente, plutôt que revalorisé. Cette technologie pourrait permettre de compenser les émissions des secteurs difficiles à décarboner, comme l’aviation. L’usine peut capturer jusqu’à 4 000 tonnes de CO2 par an. Des quantités certes modestes, mais ce n’est qu’un début. Une usine plus grande est déjà dans les tuyaux.

Si elles ne datent pas d’hier, les technologies de CCS sont aujourd’hui remises sur le devant de la scène par le contexte d’urgence climatique. Certains industriels s’unissent même pour développer des projets groupés et maximiser ainsi leurs efforts de décarbonation. En Normandie, Air Liquide, Boréalis, Esso, TotalEnergies et Yara travaillent à un projet commun de captage et de stockage de CO2. Lequel consistera à piéger le gaz carbonique des fumées industrielles des sites industriels normands, pour le réinjecter dans des cavités sous-marines au Nord de l’Europe.

 

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