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Espagne : les heures de pauses décomptées du temps de travail ?

Société Travail

En Espagne, une entreprise a décidé de décompter les temps de pauses des heures travaillées par les salariés. Une mesure qui a été portée jusque devant les tribunaux et qui a engendré de nombreuses polémiques. De nombreux partis politiques et syndicats se sont indignés de la mise en place d’une telle mesure, notamment la Confédération syndicale des Commissions ouvrières, qui a déposé un recours devant la cour suprême.

L’entreprise pétrolière Galp à l’origine de l’affaire en Espagne

L’origine de la polémique débute en mai 2019, où le gouvernement de Pedro Sánchez décide de mettre en place un registre horaire pour les salariés. L’objectif étant de mieux contrôler le temps de travail des salariés afin de limiter les heures supplémentaires non payées. Une mesure importante pour l’économie espagnole, puisque le gouvernement a chiffré ce nombre d’heures supplémentaires impayées à 2,6 millions par an.

Cette nouvelle réglementation, à la base, devait aller dans le sens des salariés, mais finalement, cette mesure pourrait se retourner contre eux. En effet, Galp, une entreprise spécialisée dans le domaine pétrolier aurait décidé, elle aussi, de contrôler de manière plus précise le temps de travail. L’entreprise a choisi de décompter les temps de pauses des heures travaillées par ses salariés, estimant que si l’on doit décompter chaque minute travaillée, les temps de pauses ne peuvent pas être comprises dans le temps de travail effectif. D’après les calculs, un employé fumant en moyenne trois cigarettes et prenant un café par jour en plus de sa pause légale, « économiserait » jusqu’à 9 jours de travail par an. Pour les entreprises, cela représenterait un manque à gagner de 730 euros par an par salarié.

Malgré les chiffres évoqués plus haut, cette décision de décompter les heures de pauses des heures de travail a provoqué un tollé en Espagne du côté de la Confédération syndicale des Commissions ouvrières. L’organisme y voit une mesure qui a « dégradé les conditions de travail des travailleurs » et a déposé une plaine devant la justice espagnole. Le 10 février dernier, l’Audience Nationale a refusé la plainte et a déclenché des vives réactions dans tout le pays.

Un système similaire peut-il arriver en France ?

D’après Olivier Angotti, un associé au cabinet d’avocats FTMS, une directive similaire à celle appliquée en Espagne pourrait également être mise en place en France, en ce sens où cela ne dépend pas d’une loi nationale, mais bien d’une directive européenne. Il explique que « le temps de pause n’est théoriquement pas un temps de travail effectif. Donc lorsqu’on prend un café, qu’on fume une cigarette, ou qu’on passe un appel personnel, ce laps de temps n’est pas du travail effectif » et que rien n’empêche un employeur de mettre en place une pratique similaire à celle instaurée par Galp.

Emmanuel Gayat, avocat chez JDS Avocats, poursuit en précisant qu’un tel système est déjà mis en place dans certains corps de métiers. Il prend de nombreux exemples en citant les conducteurs de trains, les caissiers ou encore les ouvriers d’usine qui sont soumis à « un contrôle par pointage« . Cela induit forcément que « les temps de pause pour aller prendre un café ou aller aux toilettes ne sont pas pris en compte et donc non rémunérés« . Cependant, il n’oublie pas de préciser que si ces professions sont soumises à des règles plus strictes des nombreux autres emplois sont bien moins regardants des temps de pause. Il cite notamment le secteur tertiaire, où « les choses sont beaucoup plus souples« .

Cependant, ces « largesses » dans la gestion des pauses et des heures de travail ne seraient pas aussi malsaines pour l’entreprise. En effet, Emmanuel Gayat résume que, d’expérience, « lorsque le temps de travail effectif n’est pas véritablement contrôlé, cela bénéficie davantage aux employeurs » puisque cela signifie que les heures supplémentaires « ne sont pas décomptées non plus« . Une déclaration confortée par les chiffres d’un récent sondage publié par le Figaro en 2019, où 58 % des Français affirmaient réaliser « régulièrement » des heures supplémentaires non rémunérées…

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