Le plan de transformation de l’audiovisuel public présenté par la ministre de la Culture, ce lundi 4 juin, semble être plutôt bien accueilli par les professionnels du secteur. Plusieurs grandes annonces ont été faites : suppression de France 4 en hertzien, réflexion à mener sur l’avenir de France Ô et numérisation accrue des contenus. L’audiovisuel public veut ainsi séduire les jeunes générations.
Emmanuel Macron avait promis une large refonte de l’audiovisuel public. Le train de la réforme est désormais lancé par Françoise Nyssen, une ministre de la Culture qui a la lourde charge de transformer le paysage audiovisuel public sans braquer les chaînes et leurs employés. Ce travail relève d’un jeu d’équilibriste, mais l’annonce de la suppression de France 4 n’a pas (encore ?) été trop mal accueillie. La chaîne dédiée à la jeunesse peine à se forger une identité forte et sera ainsi abandonnée au profit d’un objectif double : la numérisation pour toucher les jeunes générations.
Plus de numérique pour l’audiovisuel public
L’avenir de la télévision interroge toujours plus avec la place grandissante du numérique. Les écrans sont partout, mais ont de moins en moins la forme d’une télévision aussi plate et perfectionnée soit elle. Les chaînes de télévision se sont lancées à raison dans les services et contenus numériques et la ministre de la Culture entend accélérer le mouvement via cette réforme de l’audiovisuel public. Aujourd’hui, six chaînes publiques ont pour mission de présenter une large gamme de programmes (France 2, France 3, France 4, France 5 et France Ô). Elles ne seront plus que cinq avec la suppression annoncée de France 4.
La chaîne disparaitra des canaux hertziens, mais continuera à être diffusée en ligne. Ce « basculement numérique de France 4 » est la condition sine qua non d’ « une offre délinéarisée ambitieuse et sans publicité » pour reprendre les morts de Delphine Ernotte, la présidente de France Télévisions. L’avenir appartient donc au numérique et France 4 nouvelle version fera office de laboratoire d’essai pour un audiovisuel public à la recherche de nouveaux publics. Françoise Nyssen a d’ailleurs rappelé : « Nous nous sommes concentrés sur la transformation de l’offre parce que c’est ce qui concerne le public aujourd’hui ».
Un public jeune qui ne devrait pas voir d’inconvénient à passer de la télévision à la tablette pour continuer à voir ses programmes préférés. Pour le moment, les seules réactions négatives se font entendre du côté des syndicats. Interrogé par le journal La Croix, Stéphane Le Bars, délégué général du Syndicat des producteurs de films d’animation juge cette décision « ahurissante et catastrophique ». Ce dernier explique que « Contrairement à tous les groupes audiovisuels publics européens qui ont une
ou plusieurs chaînes jeunesse, la France tourne le dos aux enfants. On les renvoie vers le numérique alors que la TNT est l’unique mode de réception de la télévision pour 25 % des foyers français ».
L’argument n’a pas été entendu par le Gouvernement qui revendique cibler la jeunesse, public actuel et surtout futur de l’audiovisuel français. De plus, deux plateformes seront lancées en direction d’un jeune public. La première aura pour vocation de décrypter les fausses nouvelles, un cheval de bataille du président Macron qui s’est plaint d’avoir été la victime de ce genre de manipulations durant la campagne présidentielle. Les enfants, étudiants et mêmes enseignants seront conviés à se connecter au site de Franceinfo afin de faire la part des choses entre le vrai et des mensonges avérés. La seconde plateforme aura une visée culturelle et sera lancée dès la fin du mois de juin.
Remodeler l’hertzien au profit du public
La disparition de France 4 de la télévision libère le canal hertzien 14. Une aubaine pour plusieurs chaînes qui savent qu’un numéro peu élevé signifie plus de téléspectateurs. Une place que l’audiovisuel public aimerait bien voir attribué à Franceinfo (actuellement canal 27) et qui souffre de ce positionnement loin derrière les chaînes d’information en continu que sont BFM TV (Canal 15) et CNEWS (Canal 16). La ministre a toutefois rappelé que l’attribution des fréquences était du ressort de Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA).
Enfin, l’avenir de France Ô n’est pas encore arrêté. Une mission de concertation devra donner son avis à ce sujet et Françoise Nyssen a convenu qu’il faudrait « interroger nos concitoyens d’outre-mer et leurs élus pour déterminer si l’avenir est au maintien de France Ô sur le canal hertzien ou au contraire au renforcement des offres numériques des Outre-Mer Premières ». Un changement de support pourrait s’avérer beaucoup plus problématique, car beaucoup de territoires d’Outre-Mer sont attachés à cette chaîne.
La contestation de la réforme de l’audiovisuel public a également des chances de grandir à mesure que les décisions seront annoncées et le budget établi. Si les grandes orientations ne font pas trop débat, le budget (encore inconnu) alloué à chaque chaîne et service est susceptible d’alimenter les craintes. Le Gouvernement avance bien, mais il sait que le terrain est miné.