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La pêche et le Brexit

A la mi-novembre la Première ministre britannique, Theresa May, a présenté le projet de sortie de son pays de l’Union Européenne après 17 mois de négociations ardues entre Londres et Bruxelles. L’éventuelle entrée en vigueur de l’accord le 29 mars 2019 maintiendrait le Royaume-Uni au sein du marché unique pendant au moins 18 mois. Si aucun accord n’est trouvé, alors il quittera dès le 30 mai la Politique agricole commune et la Politique européenne de la pêche (PCP).

Les partisans du Brexit ont beaucoup appuyé sur les questions de l’exploitation des ressources maritimes durant la campagne. Le sujet est majeur outre-manche. En effet, Le Royaume-Uni était, en 2017, le troisième plus gros pêcheur de l’UE (722 691 tonnes pêchées) derrière le Danemark (904 450), l’Espagne (902 162) et devant la France (529 340). La réglementation européenne a même convaincu les pêcheurs nord-irlandais de voter le Brexit alors que la province a voté très majoritairement « remain ». « On veut juste éviter ces réglementations, on ne peut pas survivre avec donc on n’a pas d’autres choix que de sortir et de continuer seul » explique un marin-pêcheur britannique.

La PCP prévoit la mise en place de quotas afin de maintenir en l’état les stocks de poisson. Le conseil des ministres de la pêche les défini tous les ans ou tous les deux ans. « Ils sont répartis entre les pays de l’UE sous la forme de quotas nationaux (…) distribués en appliquant un pourcentage différent par stock et par pays » explique la Commission. Ce à quoi Theresa May répond qu’après le Brexit, son pays « négocierait en tant qu’État côtier indépendant l’accès à ses eaux territoriales ». Une façon d’assurer aux travailleurs de la mer britanniques qu’ils pourront reprendre en main les stocks halieutiques de leurs côtes. Près de la 40% des poissons péchés en Europe le sont dans les eaux britanniques. Entre 2011 et 2015, les pêcheurs britanniques ont prélevé 90 000 tonnes de poisson dans les eaux de leurs voisins alors que sur la même période ce sont 760 000 tonnes qui ont été pêchées par des pavillons étrangers.

Près de 40 ans après la mise en place de la PCP, le Brexit pourrait être douloureux pour les pêcheurs français. Ces derniers font 30% de leurs captures dans les eaux britanniques (50% pour les bretons, 75% pour les Hauts-de-France). Ces deux régions et la Normandie représentent 75% du secteur français. 110 millions d’euros de chiffre d’affaires du secteur proviennent des eaux britanniques.

« Si le Brexit rétablit une frontière terrestre et ferme ses eaux, nos pêcheurs perdront 30 % de leurs revenus », affirme Sean O’Donoghue, porte-parole des pêcheurs bruxellois. En France, le lieu noir, à 92%, et le hareng, à 74%, viennent des eaux britanniques. Sans accord bilatéral, des dizaines de milliers d’emplois sont menacés cotés français.

Henri Sorenson

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