Le Plan Bâtiment Durable doit penser le bâtiment du futur

Economie Energie Environnement

Parce que la filière du bâtiment est gourmande en énergie, grande pourvoyeuse de CO2, cela la rend tout particulièrement attentive aux problématiques de développement durable. C’est au lendemain du Grenelle de l’environnement qu’il fut décidé de porter sur les fonts baptismaux le Plan Bâtiment Durable. L’un des objectifs majeurs de sa feuille de route : réunir autour de la table l’ensemble des acteurs publics et privés du secteur pour penser et inventer le bâtiment du futur, celui qui assurera à la fois le bien-être de ses occupants, qui maîtrisera ses impacts environnementaux et sera en capacité d’optimiser, voire de mutualiser ses performances énergétiques.

Le Plan Bâtiment Durable fédère donc l’ensemble des acteurs du bâtiment et de l’immobilier autour des enjeux environnementaux et énergétiques. « C’est une organisation tout à fait originale sans aucun équivalent dans d’autres champs économiques ou politiques de notre société », explique Anne-Lise Deloron, directrice adjointe du Plan. Parce que le poids du secteur du bâtiment dans le réchauffement climatique est considérable – « près de 45 % de la consommation énergétique du pays et plus d’un quart des émissions de gaz à effet de serre » –, les acteurs de la société civile comme les pouvoirs publics ont pris conscience de la nécessité d’agir sur la filière, qui est devenue une priorité de l’action publique. En 2009, le gouvernement « dote le secteur économique d’un programme ambitieux et d’un pilotage spécifique, capable de mettre en mouvement, dans la durée, l’ensemble des acteurs publics et privés du bâtiment et de l’immobilier. Il fallait mettre sous tension la filière et la société civile ». C’est par une lettre de mission du premier ministre François Fillon que, début 2009, Philippe Pelletier est nommé président de ce qui s’appelle alors « le Plan Bâtiment Grenelle ». En septembre 2012, une nouvelle impulsion, donnée par une lettre des ministres en charge des sujets, confie à nouveau à Philippe Pelletier la mission de conduire le plan de performance énergétique des bâtiments, sous le vocable cette fois de Plan Bâtiment Durable. Fin 2017, « Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, reconduit [Philippe Pelletier] via une nouvelle lettre de mission, qui s’appuie sur l’action engagée depuis 2009 et conforte le large champ d’action du Plan Bâtiment en construction comme en rénovation dans le parc tertiaire comme résidentiel ». À cette occasion, le ministre appelle à amplifier la mobilisation des acteurs au moment où se déploie le Plan Climat du gouvernement, « et invite [notre] président à être attentif à l’ensemble des segments du parc bâti et aux évolutions des bâtiments de demain », explique Anne-Lise Deloron.

Le Plan Bâtiment Durable « est reconnu pour sa force de proposition et sa capacité à élaborer de façon concertée et collective des propositions dans les différents champs où il intervient. Il est un maillon entre les pouvoirs publics et l’ensemble des acteurs, qui fait en sorte notamment que les attentes de ces derniers soient portées aux oreilles des pouvoirs publics ». Le rôle premier du Plan « est de veiller à ce que les mesures proposées par les pouvoirs publics soient bien en adéquation avec les attentes des acteurs ». Le Plan Bâtiment constitue le lieu privilégié d’un large rassemblement de la filière « en raison de la grande diversité des sujets abordés et la diversité des partenaires qui le composent, associations, ONG, grandes et petites entreprises, ce qui en fait un lieu œcuménique ».

Depuis sa création, « les travaux du Plan ont permis de faire émerger l’ensemble des dispositifs qui structurent aujourd’hui, sur chaque segment du parc, la politique publique en matière d’efficacité énergétique et environnementale du bâtiment ». En 2017, il a notamment participé aux premières évaluations de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et a largement diffusé ses propositions en vue de la préparation du Plan de rénovation énergétique des bâtiments pour le nouveau quinquennat. Depuis la fin 2012, le Plan Bâtiment Durable s’étoffe et porte sa voix dans les provinces, avec des déclinaisons régionales. Ces Plans, « portés par les conseils régionaux en liaison étroite avec les services de l’État et ses agences, ont vocation, sur les territoires, à reproduire l’effet réseau et catalyseur du Plan Bâtiment. Ces structures accompagnent au plan régional les sujets d’intérêt national ». Le cru 2017 fut marqué par l’élaboration des programmes régionaux d’efficacité énergétique, et « l’objectif à l’horizon 2020 est d’avoir un Plan Bâtiment Durable en place dans chacune des régions ».

Le Plan Bâtiment se caractérise particulièrement par son rôle de « boîte à idées » à l’égard des pouvoirs publics et de l’ensemble de la filière. Cette force de proposition « est alimentée par les différents rapports des groupes de travail, en effet, l’une de nos forces est de pouvoir réunir les acteurs et les experts d’un sujet autour d’une table et de les faire cogiter ». En dix-huit ans, près d’une quarantaine de groupes de travail furent mis sur pied. Chacun d’entre eux produit un rapport « auquel il appartient à l’équipe permanente du Plan de porter les propositions auprès des pouvoirs publics et des différentes instances de concertation et de décision concernées ». L’année dernière fut remis à la ministre du Logement et de l’Habitat durable le rapport sur le financement de la rénovation énergétique des logements et le déploiement du tiers financement. Sur tous les fronts, le Plan Bâtiment Durable est notamment très actif dans la préparation de la future réglementation environnementale, « par le jeu conjugué des lois de Grenelle et de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, un nouveau standard environnemental ambitieux pour les constructions neuves est en train de se mettre en place afin de généraliser, au terme du processus, les bâtiments à énergie positive et à faible empreinte carbone ». C’est l’expérimentation « E+C- » qui a commencé à se déployer en 2017 et qui doit « permettre de réaliser des constructions qui seront notamment sobres en carbone sur l’ensemble de leur cycle de vie, et d’en tirer tous les enseignements utiles à la mise en place de la future réglementation ». La notion d’énergie positive « oblige à réfléchir non plus au simple niveau du bâtiment lui-même, mais à élargir la vision au-delà vers l’îlot, le quartier ou même la ville, produire de l’énergie à sa propre échelle ou mutualiser ».

Les groupes de travail Plan Bâtiment Durable éclairent le futur et anticipent les enjeux de demain. Depuis l’annonce de la préparation de la future réglementation, les pouvoirs publics et les acteurs de la filière partagent l’idée que la prochaine réglementation ne sera plus thermique mais environnementale, « cette déclaration consacre les travaux menés depuis 2011 par le groupe de travail prospectif RBR, pour “Réflexion Bâtiment Responsable 2020-2050”, qui très tôt a élargi la focale ». Ce groupe de réflexion a porté l’idée que la future réglementation en la matière devait adopter une approche plus responsable et environnementale et « défend l’idée que le développement des bâtiments responsables doit replacer l’habitant au centre des préoccupations, et qu’il doit être conçu pour ses utilisateurs et pensé en synergie avec l’environnement ».

Pour ce qui est de 2018, « qui sera essentielle », plusieurs fers sont au feu ! Parmi ceux-là, la lutte contre la précarité énergétique. « Une priorité renouvelée et un enjeu de justice sociale », qui fait l’objet d’un groupe de travail dédié depuis la création du Plan. Celui-ci a donc toute légitimité pour mesurer l’ampleur du phénomène, « on estimait [dès 2009] que plus de 3,8 millions de ménages étaient en situation de précarité énergétique ». Le Plan Bâtiment ne se préoccupe donc pas que du futur, mais aussi du présent !

Article paru initialement sur filiere-3e.fr.

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